Des mines sur la lune

L’hélium 3

L’hélium 3, isotope non radioactif de l’hélium, provient des couches externes du soleil. Il est projeté par les vents solaires dans le système solaire. Sur Terre il n’est présent qu’en de très faibles quantités (500kg), en raison du champ magnétique de notre planète. En revanche, les missions Apollo ont montré que la Lune en possède d’importantes réserves : la sonde chinoise Chang’e-1 a récemment permis d’estimer à 100 000 tonnes la masse présente dans le régolite, la couche de poussière recouvrant le sol sur une épaisseur de 5 m environ.

Quand l’hélium 3 se combine au deutérium, la réaction de fusion se produit à très forte température et peut générer des quantités considérables d’énergie. Vingt cinq tonnes d’hélium 3, qu’on peut transporter en navette spatiale, suffiraient pour fournir de l’électricité aux Etats-Unis pendant toute une année

 Mais les choses ne sont pas simples. Pour extraire l’hélium 3 du sol lunaire, il faut chauffer les roches à 800 degrés Celsius, et 200 millions de tonnes de sol lunaire sont nécessaires pour produire une tonne de ce gaz.

Dans son numéro du du 25 août, le magazine Courrier international se penche (à son tour) sur l’exploitation des gisements d’hélium 3 sur la lune à partir d’un article de The Ecologiste sauvegardé ici.

Matthew Genge, professeur au département d’ingénierie de l’Imperial College de Londres, estime que des centaines de milliers de tonnes de cet isotope sont « facilement exploitables par des mines à ciel ouvert ».

Actuellement, le prix de l’hélium 3 extrait sur terre est de l’ordre de 16 millions de dollars le kilo. Ce coût est à rapprocher de  celui de l’envoi d’objets dans l’espace – 25 000 dollars le kilo.

Jusqu’à présent, les technologies industrielles de la fusion de l’hélium3 sont peu développées mais il y a de bonnes chances qu’elles aboutissent à de rapides progrès si cette ressource devenait abondante.

La lune présente aussi d’importantes réserves d’eau – au moins 1 milliard de tonnes.

L’entreprise texane Shackleton Energy a un projet d’exploitation lunaire : faire fondre la glace, purifier l’eau, obtenir alors de l’hydrogène et de l’oxygène puis du peroxyde d’hydrogène pour les fusées. Un réseau de stations en orbite terrestre basse optimiserait les transferts de matériaux et de personnes.

Budget ? Un coût global de 20 milliards de dollars sur 10 ans (3 EPRs ?) est évoqué pour cette mise en exploitation. Le secteur privé est plus intéressé que les états eux-mêmes qui peineront à réunir les fonds nécessaires. De plus les « mercenaires » des sociétés privées pourraient être exposés à des risques du type « aller simple puis survie » qui paraissent politiquement risqués pour les états…

Depuis 2004 la Chine développe son propre programme d’exploration lunaire à l’horizon 2017. Du point de vue règlementaire, le droit international sur la lune présente suffisamment de failles pour autoriser un scénario de « premier arrivé premier servi ».

Le mur du temps

Mais tout ceci se heurte à un mur : celui du temps. Même en cas d’accélération fulgurante de ces projets, l’implantation des stations lunaires, la mise en place de stations relais surtout la mise au point de réacteurs à fusion de l’hydrogène H3 prendront entre 30 et 50 ans. D’ici là les tensions sur l’approvisionnement en énergie carbonée mais surtout le réchauffement climatique auront atteint des niveaux ingérables … Le problème fondamental reste posé mais il n’en reste pas moins nécessaire de nous interroger.

Point N°1 : quel débat autour de ces orientations ? Même si des incertitudes considérables accompagnent ces schémas du futur, il importe de ne pas reproduire la situation de désinformation et de mise devant le fait accompli comme pour le nucléaire de fission dans les années 70.

Point N°2 : ces projets ne font que prolonger et amplifier la tendance déjà dénoncée par Toffler, Ellul mais encore plus radicalement par Hannah Arendt : la fuite en avant vers le gigantisme et la perte de repères.

Il est indispensable de nous ouvrir aux possibilités, aux espoirs et aux risques concernant un temps que nous ne vivrons pas. N’est-ce pas cela, la civilisation : nous préoccuper des générations futures ? Autrefois nos ancêtres ont planté des arbres qu’ils n’ont jamais vu à l’apogée de leur beauté. Aujourd’hui il s’agit de dessiner un avenir qui ne s’arrête pas en 2030 ni même en 2050 . Mais sommes-nous toujours civilisés ?

Date de dernière mise à jour : 05/07/2021

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